R.M.N

Cristian MUNGIU

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R.M.N

Un film de Cristian MUNGIU

2022 | Fiction | 125 min | Le Pacte

Producteur
Why Not Productions
01 48 24 24 50
contact@whynotproductions.fr

Distributeur
Le Pacte
+ 33 1 44 69 59 59

Site du film

Synopsis

Quelques jours avant Noël, Matthias est de retour dans son village natal, multiethnique, de Transylvanie, après avoir quitté son emploi en Allemagne. Il s’inquiète pour son fils, Rudi, qui grandit sans lui, pour son père, Otto, resté seul et il souhaite revoir Csilla, son ex-petite amie. Il tente de s’impliquer davantage dans l’éducation du garçon qui est resté trop longtemps à la charge de sa mère, Ana, et veut l’aider à surpasser ses angoisses irrationnelles. Quand l’usine que Csilla dirige décide de recruter des employés étrangers, la paix de la petite communauté est troublée, les angoisses gagnent aussi les adultes. Les frustrations, les conflits et les passions refont surface, brisant le semblant de paix dans la communauté.

NOTE D’INTENTION DU REALISATEUR :

R.M.N. se déroule en Transylvanie, la province plus occidentale de Roumanie, dans un petit village multi-ethnique, peu avant la pandémie de covid-19, entre Noël 2019 et le début de l’année 2020. L’histoire est celle de Matthias, qui revient d’Allemagne où il travaillait en usine, et de Csilla, qui est la numéro 2 d’une boulangerie industrielle installée au village.

La Transylvanie

Je me rappelle avoir vu dans les années 80 FRANKENSTEIN JUNIOR, de Mel Brooks. Le film était drôle et encore plus pour nous, Roumains : le héros prend un train à New York pour arriver à Bucarest, qui est présentée comme la capitale de la Transylvanie. La Transylvanie était alors cet endroit du bout du monde, le pays des vampires et des monstres.
Je ne m’étendrai pas trop sur l’histoire réelle de la Transylvanie : c’est une région qui a été disputée entre deux pays et qui est passée de l’un à l’autre. Un peu comme l’Alsace et la Lorraine. Dans notre cas, c’est entre la Roumanie et la Hongrie, ou plutôt entre la Roumanie et l’Empire Austro-Hongrois. Ainsi, des Roumains et des Hongrois cohabitent en Transylvanie. Mais ils n’en sont pas les seuls habitants. Il y a environ 700 ans, les Saxons ont reçu des terres dans cette région, aux confins de l’Europe, près des Carpates. On trouve donc aussi des Allemands. La plupart d’entre eux sont partis dans les années 70, lorsque Ceausescu les a vendus à la République Fédérale Allemande pour 5000 Deutsche Mark par tête. Les autres sont partis après la chute du communisme. Mais leurs maisons, leurs églises fortifiées, leurs cimetières et leurs villages aux hautes clôtures sont toujours là. Il y a aussi beaucoup de Roms en Transylvanie. Les premiers sont arrivés en tant qu’esclaves ou en tant que domestiques il y a environ 200 ans et beaucoup se sont ensuite installés dans les maisons abandonnées par les Allemands après leur départ.
Avec autant d’ethnies, la Transylvanie est devenue le terrain de jeu favori des mouvements populistes ou nationalistes de toutes sortes.
Dans les années 90, de violentes tensions ont éclaté, faisant plusieurs victimes. Ensuite, les choses se sont calmées : beaucoup de gens sont partis travailler à l’étranger pour échapper à la pauvreté, qui touchait toutes les ethnies. De temps en temps, le nationalisme se ravive, surtout avant les élections.
Mais ne vous méprenez pas : le film ne traite pas d’une situation spécifique à la Transylvanie, ni même du fait que Roumains, Hongrois et Allemands partagent le même territoire. Il parle aussi des Russes et des Ukrainiens, des Blancs et des Noirs, des Sunnites et des Chiites, des riches et des pauvres, voire des grands et des petits… Dès qu’apparaît un autre individu, il est tout de suite perçu comme appartenant à un autre clan et donc comme un ennemi potentiel.
Langues, religions, drapeaux (et autres petites différences pour lesquelles les gens s’entretuent).
Dans le film, les Hongrois parlent le hongrois, les Roumains parlent le roumain, les Allemands parlent l’allemand. Néanmoins, tous se comprennent. Ils parlent tous anglais, puisqu’il s’agit aussi d’une histoire sur la mondialisation et ses effets secondaires. Les personnages les plus sophistiqués parlent même français. Et, bien sûr, le Français parle anglais, tandis que les gens qui viennent de loin parlent leur langue, que personne ne comprend.
En tant que spectateur, si vous comprenez toutes ces langues, bravo. Sinon, il y a des sous-titres : ils ont parfois des couleurs distinctes pour marquer les différentes langues, tandis que d’autres fois, ce sera à vous de trouver qui parle quoi.
Les Roumains ont un drapeau rouge-jaune-bleu. Les Hongrois de Hongrie ont un drapeau rouge-blanc-vert. Les Hongrois de Transylvanie, eux, ont un drapeau bleu et jaune : le drapeau du comté autoproclamé de Székely (Tinutul Secuiesc en roumain, Pays Sicule en français), qui milite pour l’autonomie. Curieusement, pour des raisons historiques, ce comté ne se trouve pas à la frontière avec la Hongrie, mais au beau milieu de la Roumanie.

Les Roumains sont majoritairement orthodoxes, les Hongrois sont majoritairement catholiques et les Allemands sont majoritairement luthériens. Mais ce n’est pas si simple : certains Hongrois sont unitariens, certains Roumains sont gréco-catholiques, certains Allemands sont calvinistes. Ainsi, chaque village possède plusieurs églises, différentes les unes des autres ; même les cloches sonnent différemment.
Aujourd’hui, avec tant de gens partis travailler à l’étranger, beaucoup d’églises ont perdu la plupart de leurs paroissiens. Les églises protestantes sont fermées. Pourtant, il y a souvent quelqu’un dans le village qui détient la clé de l’église pour ceux qui souhaitent la visiter. Lorsque quelqu’un du village meurt à l’étranger, parfois à des milliers de kilomètres, un membre de sa famille appelle afin que les cloches de son village natal sonnent pour lui.
Ces différences peuvent sembler mineures et elles sont certainement compliquées à suivre. Pourtant, tout au long de l’histoire, des guerres ont été menées à cause de ces particularités et des personnes ont tué d’autres personnes pour des différences encore plus petites.

MIORITZA et les autres inspirations du film

Je n’avais pas réalisé que MIORITZA était une source d’inspiration pour ce film avant de remarquer combien de moutons et autres animaux y figurent. Comment vous expliquer MIORITZA ? MIORITZA (qui signifie « agnelle ») est un poème populaire du folklore roumain qui raconte l’histoire de trois bergers et de leurs troupeaux. Ces bergers viennent de régions différentes, l’un d’entre eux a plus de moutons et il est plus riche ; alors les deux autres décident tout simplement de le tuer et de s’emparer de son troupeau. Ses moutons bien-aimés, son chien fidèle et la nature en général tentent de l’avertir, mais il croit au destin : si tel est son destin, qu’il en soit ainsi. Chez nous, il existe une sorte de philosophie de la vie associée à MIORITZA, à la mentalité du berger et à la géographie roumaine : il s’agit de suivre le rythme des montées et des descentes, selon le relief des collines et des vallées. Nous étudions tous MIORITZA à l’école et dans le film, les enfants le récitent pour la fête de Noël. Le chien fidèle de Matthias le
prévient en cas de danger et ses moutons tiennent à lui peut-être plus que quiconque.
Outre MIORITZA, il y a bien sûr l’histoire réelle : avant la pandémie, certains propriétaires d’usines du Comté de Székely ont envisagé d’embaucher des travailleurs venus de loin – étant donné que les locaux étaient partis travailler en Europe occidentale. Mais les personnages de R.M.N. et les relations entre eux sont fictifs, tout comme les motivations et les attitudes de chacun, ainsi que les événements du récit lui-même. Une autre source d’inspiration lointaine est l’histoire des mines d’or de Rosia Montana, en Transylvanie. En gros, il s’agit du dilemme suivant : faut-il donner du travail à des gens qui extraient de l’or (et en utilisent
du cyanure qui détruit l’environnement) ou préserver l’environnement et les magnifiques paysages pour les générations futures, tandis que les habitants vivront dans un état de pauvreté permanent ?
Et puis, il y a eu les reportages réguliers sur la présence d’animaux sauvages et leurs effets collatéraux, puisque la Roumanie possède apparemment la plus grande population d’ours et de loups d’Europe.

Les Traditions

Les traditions signifient que les gens font quelque chose parce que d’autres personnes l’ont fait avant eux. Cet acte a d’abord été accompli dans un certain but, très souvent pour «chasser le mauvais oeil». Vous devez convenir que même cette explication a plus de sens que de faire quelque chose parce que «c’est la tradition».
Dans le film, nous dépeignons plusieurs traditions se répétant autour de Noël : certains s’habillent en peaux de mouton ou de chèvre et
dansent, d’autres portent des peaux d’ours et se font fouetter, d’autres encore s’habillent comme nos ancêtres, les Daces, appréciés pour
s’être opposés à la conquête romaine. Dans certaines autres régions de Roumanie, les hommes portent simplement pour le Nouvel An des
masques et un énorme casque sur la tête. Ils se retrouvent ensuite le premier jour de l’année et se battent entre eux, « jusqu’à ce que mort s’en suive ». Ils ne viennent même pas de villages différents : ce sont souvent ceux des collines contre ceux de la vallée – et parfois certains sont vraiment tués. Ne les jugez pas : au moins, c’est un combat équitable. Pas très différent de tous les sports et compétitions qui résultent du même instinct d’engager son clan contre un autre.

Stéréotypes et récits

On explique souvent la position actuelle de la Roumanie au sein de l’Europe par l’idée suivante : si nous n’avons pas réussi à nous développer autant que les sociétés occidentales c’est parce que nous étions occupés à combattre les envahisseurs sur leur route pour piller
l’Europe. Pendant que nous les retenions à l’Est, les Occidentaux ont eu le temps de se développer – et ériger leurs opulentes cathédrales.
Mais il y a beaucoup d’autres récits plus actuels pour expliquer l’état du monde d’aujourd’hui : la mondialisation est la nouvelle Babel, un
signe que le monde arrive à sa fin ; lorsque les maladies seront elles aussi « mondialisées », la fin suivra rapidement. Le réchauffement de
la planète est encore un autre signe de la fin imminente : bientôt les ressources surexploitées seront épuisées et les gens se battront pour
survivre.
Pendant des siècles, il était facile d’identifier les envahisseurs. Les habitants vivaient dans de petits villages au milieu des forêts et dès que quelqu’un à cheval arrivait de l’autre côté de la colline, c’était un ennemi potentiel (le tourisme est venu plus tard). Aujourd’hui, avec les avions, les choses sont devenues plus complexes. Un stéréotype dit aussi que les Huns, ancêtres des Hongrois, arrivaient à cheval et mangeaient de la viande crue qu’ils avaient attendrie sous leur selle. Cette croyance est si courante que personne ne la met en doute. Il y a une trentaine d’années, le Conseil européen a recommandé l’utilisation du terme Roms au lieu de Gitans – perçu comme offensant. La Roumanie a tenté de s’opposer à cette initiative pour la confusion qu’elle générait entre Roms et Roumains, mais sans succès, si bien que la confusion s’est accentuée. Pour les Roumains, le fait d’être considéré comme Rom est la plus grande offense, tandis que les Occidentaux perçoivent notre volonté de faire la distinction comme une attitude discriminatoire inappropriée.

Les Thèmes

R.M.N. questionne les dilemmes de la société actuelle : la solidarité face à l’individualisme, la tolérance face à l’égoïsme, le politiquement
correct face à la sincérité. Il interroge aussi ce besoin atavique et de considérer naturellement les autres (qu’ils soient d’une autre ethnie, d’une autre religion, d’un autre sexe ou d’une autre classe sociale) avec réserve et suspicion.
C’est une histoire sur les temps anciens (perçus comme dignes de confiance) et les temps actuels (perçus comme chaotiques) ; sur la sournoiserie et la fausseté d’un ensemble de valeurs européennes qui sont davantage revendiquées qu’elles ne sont appliquées en réalité.
C’est une histoire d’intolérance et de discrimination, de préjugés, de stéréotypes, d’autorité et de liberté. C’est une histoire de lâcheté et
de courage, d’individu face à la foule, de destin personnel face au destin collectif. C’est aussi une histoire de survie, de pauvreté, de
peur face à un avenir sombre.
Le film évoque les effets de la mondialisation sur une petite communauté enracinée dans des traditions séculaires : les valeurs d’autrefois se sont dissipées, l’accès à l’internet n’a pas apporté à ces gens de nouvelles valeurs, mais les a plutôt accablés par la difficulté
de distinguer la vérité de leurs opinions personnelles dans le chaos informationnel et moral actuel.
R.M.N. aborde également les effets secondaires du politiquement correct : les gens ont appris qu’il valait mieux ne pas s’exprimer à haute voix quand leurs opinions diffèrent de la norme actuelle. Seulement le politiquement correct n’est pas un processus formateur et il n’a pas changé les opinions en profondeur ; il a juste fait en sorte que les gens expriment moins ce qu’ils pensent. Mais les choses finissent par s’accumuler et, à un moment donné, elles débordent. Le film n’associe pas les opinions «politiquement incorrectes» à une ethnie ou un groupe en particulier : les opinions et les actions étant toujours individuelles, elles ne dépendent pas de l’identité d’un groupe mais de facteurs beaucoup plus complexes.
Au-delà des connotations sociales, l’histoire se situe à un niveau humain plus profond : elle parle de la façon dont nos croyances peuvent façonner nos choix, de nos instincts, de nos pulsions irrationnelles et de nos peurs, des animaux enfouis en nous, de l’ambiguïté de nos sentiments, de nos actions et de l’impossibilité de les comprendre pleinement. Les choses que j’aime le plus dans le film sont celles qui ne peuvent être mises en mots.

Les Fils rouges visuels

Il y a plusieurs images et motifs visuels récurrents dans le film. Si vous avez un jour la patience de regarder le film deux fois, vous aurez
quelque chose de plus à découvrir.

Le Style

Tourner chaque scène en plan séquence (quelle que soit sa longueur ou sa complexité) est une décision qui a défini le style de ce film.
Par conséquent, en tant que réalisateur, je dois mettre en scène la situation de manière aussi crédible et véridique que possible, puis enregistrer ce moment. Le rythme ne vient pas du montage, mais il est inhérent à la scène. Les ellipses n’ont lieu qu’entre les scènes – la
situation se déroule en temps réel, rien n’est coupé. Cette décision a conduit à tourner en une seule prise une scène collective de 17 minutes avec 26 personnages qui parlent.

Tournage

Le scénario a été écrit au printemps 2021, le financement et la production ont suivi rapidement. Le tournage a eu lieu de novembre 2021 à janvier 2022. Nous avons préféré ne pas tourner dans le comté de Székely, mais à Rimetea, un ancien village de Transylvanie qui a été classé au patrimoine de l’UNESCO. Les rôles principaux sont interprétés par des acteurs professionnels,
les rôles secondaires par des non-professionnels. Chaque acteur a reçu ses dialogues mais pas les scènes concernant des situations
que leurs personnages ne connaissent pas. Les dialogues étaient entièrement écrits.
Le film a été tourné en numérique, dans des lieux existants, à l’exception de la maison de Csilla qui a été construite de toutes pièces sur place.

Le Titre

Apparemment, l’empathie et d’autres compétences sociales sont générées à la surface du cortex cérébral, tandis que les instincts plus primaires qui ont permis aux humains de survivre occupent les 99 %
restants du cerveau.
R.M.N. signifie Rezonanta Magnetica Nucleara. En anglais, c’est N.M.R. – Nuclear Magnetic Resonance. Et en français, c’est I.R.M., Imagerie par Résonance Magnétique. Plus largement, il s’agit d’une investigation du cerveau, un scanner cérébral qui tente de détecter des choses sous la surface.
En lisant le scénario, quelqu’un a suggéré que le film pourrait s’appeler Europe 2.0. Pendant le tournage, je suis tombé sur une photo de la fin du 19e siècle dans l’un des lieux de tournage, intitulée : L’Agneau de Dieu.
J’ai pensé que R.M.N. ferait un bon titre.

LISTE TECHNIQUE

Réalisation et scénario : Cristian Mungiu
Chef opérateur : Tudor Vladimir Panduru, RSC
Décors : Simona Pădurețu
Costumes : Cireșica Cuciuc
Montage : Mircea Olteanu
Son : Olivier Do Hùu, Constantin Fleancu et Marius Leftărache
Producteur exécutif : Tudor Reu
Producteur : Cristian Mungiu / Mobra Films (RO)
Coproducteurs : Pascal Caucheteux et Grégoire Sorlat / Why Not Productions (FR) Delphine Tomson / Les Films du Fleuve (BE) Anthony Muir et Kristina Börjeson / Film I Väst (SE)
Distribution France : Le Pacte
Ventes Internationales : Wild Bunch International

Réalisateur
Cristian MUNGIU

Cristian Mungiu est né en 1968 à Iaşi en Roumanie. Son premier film OCCIDENT est invité à la Quinzaine des Réalisateurs en 2002 et fait un triomphe en Roumanie. En 2007, son deuxième long métrage 4 MOIS, 3 SEMAINES, 2 JOURS est récompensé de la Palme d’or au Festival de Cannes. Il reçoit l’éloge des critiques et de nombreuses autres distinctions dont celles du Meilleur Film et Meilleur Réalisateur de l’Académie européenne du Cinéma. En 2009, il revient à Cannes en tant que scénariste-coréalisateur producteur du film à sketches CONTES DE L’ÂGE D’OR, ainsi qu’en 2012 en tant que scénariste-réalisateur avec AU-DELÀ DES COLLINES récompensé du Prix du meilleur scénario et d’un double Prix d’Interprétation Féminine. En 2016, il obtient le Prix de la mise en scène lors du 69ème Festival de Cannes pour son cinquième film BACCALAURÉAT. Il signe son retour en 2022 avec R.M.N. Le film est présenté pour la première fois au Festival de Cannes, en sélection officielle, en compétition.


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